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Jeudi 15 octobre 2020
18 h. 30,
Archives d’État

Conférence de Monsieur Bénédict Frommel,
historien

En 1886, l’ensemble des établissements traditionnels – moulins et ateliers industriels – mus par les eaux du Rhône à la hauteur de Genève sont démantelés, mettant ainsi un terme à plus d’un millénaire et demi d’exploitation. Ils sont remplacés par une installation unique et surpuissante, l’Usine des forces motrices de la Coulouvrenière. Ce changement de modèle consacre l’abandon d’une production énergétique dispersée et techniquement empirique au profit d’une gestion de la ressource hydrique centralisée et organisée rationnellement. C’est ainsi que la nouvelle installation, en plus de fournir au secteur industriel l’énergie dont il a besoin pour mouvoir ses machines, assure également l’approvisionnement de la population en eau et la régularisation du niveau du lac Léman.

Dans le processus ayant mené à cette mutation, il apparaît que Guillaume Henri Dufour a joué un rôle plus significatif que supposé jusqu’ici. En effet, en tant qu’ingénieur cantonal, il élabore au printemps 1848 à la demande du Conseil d’État un projet d’île industrielle qui préfigure sur plusieurs points l’Usine des forces motrices réalisée 35 ans plus tard. Qu’on en juge. Implantée dans le lit du Rhône à la hauteur de la Coulouvrenière, l’île développe 385 m de longueur pour une largeur comprise entre 58 et 78 m. Elle est traversée en son centre par un canal forçant le passage des eaux du fleuve à travers quatre turbines horizontales, un type de moteur alors inédit à Genève. Pour donner corps à l’ouvrage, il est prévu d’extraire les matériaux de l’important fossé entourant Saint-Gervais, transformé de la sorte en canal d’évacuation lors des périodes de hautes eaux du lac Léman. Un pont métallique assure la communication avec la Coulouvrenière. Toutefois, à l’été 1848, Dufour recommande l’abandon de son projet. Raison invoquée, un coût de réalisation disproportionné avec les bénéfices escomptés. L’idée d’une gestion plus rationnelle du potentiel énergétique du Rhône n’en continuera pas moins de germer pour aboutir à la révolution technologique apportée par Théodore Turrettini et le Bâtiment des Forces Motrices.

Bénédict Frommel est historien au Service de l’inventaire des monuments d’art et d’histoire (Office du patrimoine et des sites) de l’État de Genève. Il est l’auteur de plusieurs études, expositions et publications sur le patrimoine industriel, hydraulique et rural local. Il a par ailleurs collaboré à la rédaction des quatre premiers volumes genevois de la série Monuments d’art et d’histoire publiée par la Société d’histoire de l’art en Suisse.

© Reconstitution du projet d’île industrielle par G. H. Dufour (1848)
sur la base de la carte Mayer de 1822 (BGE).